CANADA | L'Ombudsman de l'Ontario publie son plus récent rapport d'enquête concernant les normes de la protection de l'enfance

La Société d’aide à l’enfance de Toronto a omis à maintes reprises de protéger les intérêts d’un jeune garçon, malgré de multiples enquêtes et rapports faisant état de préoccupations quant à son bien-être et ses conditions de vie. C’est ce que révèle l’Ombudsman de l’Ontario, Paul Dubé, dans son plus récent rapport d’enquête.

Le rapport, intitulé Une voix inécoutée : L’histoire de Brandon, est le premier de l’Ombudsman au sujet d’une société d’aide à l’enfance depuis que son Bureau a obtenu le droit de surveillance des agences de protection de l’enfance en 2019. Il détaille les nombreux manquements de la SAE au respect des Normes de la protection de l’enfance en Ontario et de ses propres politiques.

La SAE accepté les 18 recommandations du rapport de l’Ombudsman.

L’enquête couvre la période du 30 décembre 2015 au 26 octobre 2018, lorsque « Brandon » avait entre 7 et 10 ans. Le 22 octobre 2018, la police et les services d’ambulance ont trouvé l’enfant sur un futon souillé d’urine, dans l’appartement crasseux et infesté de vermine qu’occupait un membre de la famille. Quand la police a appris que la SAE n’avait pas l’intention d’appréhender Brandon, elle l’a fait elle-même et l’a emmené dans un foyer d’accueil, où il est resté depuis.

À de nombreux moments durant l’intervention de la SAE dans ce dossier, « l’attention de la SAE a été distraite par les assurances données par la famille de Brandon. Elle a perdu de vue sa responsabilité d’agir dans l’intérêt véritable de l’enfant, le laissant souffrir en silence dans une négligence chronique », écrit l’Ombudsman dans son rapport.

« Les voix des enfants sont trop souvent réduites au silence en présence des adultes qui les entourent. Il est de la responsabilité des sociétés d’aide à l’enfance de s’assurer que les enfants sont entendu(e)s, afin de s’acquitter correctement de leur rôle de protection. »

La SAE est intervenue dans la vie de Brandon, de diverses manières, depuis sa naissance. Quand il a atteint l’âge de sept ans, la SAE avait reçu plus d’une douzaine de rapports sur sa famille, avait ouvert et clos deux enquêtes, au cours desquelles plusieurs inquiétudes avaient été vérifiées, y compris la longue série de problèmes médicaux graves et d’absences scolaires persistantes de Brandon.

L’enquête de l’Ombudsman a révélé que la période de près de trois années précédant l’appréhension de Brandon avait été entachée de multiples retards dans les enquêtes, les évaluations de sécurité, les visites et les plans de services, car les superviseur(e)s de la SAE avaient souvent approuvé des dérogations aux normes prévues par la loi, pour des raisons de commodité plutôt que par souci de l’intérêt véritable de Brandon. Les services de la SAE et sa réponse aux préoccupations des nombreux(ses) professionnel(le)s concerné(e)s par le cas de Brandon, dont ses enseignant(e)s, sa directrice d’école, ses médecins et sa pédiatre se sont avérés souvent inadéquats, et n’ont pas été apportés dans les délais voulus.

« Plutôt que d’être caractérisées par la diligence requise, ses mesures l’ont été par des retards et des lacunes », dit l’Ombudsman à propos de la SAE, soulignant que l’intervention de la police de Toronto en octobre 2018 avait « sans doute permis d’éviter un scénario plus tragique ».

Les rencontres avec la famille ont souvent été retardées – ce qui est contraire aux Normes de la protection de l’enfance. Une visite a été retardée de près d’un mois, tandis qu’à une autre période la SAE a négligé d’effectuer des visites pendant plus de six mois. Les travailleur(euse)s de la SAE qui se sont succédé n’ont pas rencontré Brandon en privé, contrairement à ce qui était exigé, et les superviseur(e)s ont généralement approuvé cette dérogation par rapport aux normes, au motif que Brandon avait refusé de parler à une travailleuse. Sa voix n’avait « pas été entendue, pas été écoutée », déclare l’Ombudsman.

L’Ombudsman souligne que l’histoire de Brandon « n’est pas un cas de négligence délibérée de la part des aidant(e)s, mais d’incapacité des membres de sa famille à répondre à ses besoins compte tenu de leurs grandes difficultés ». Il souligne néanmoins que « la norme en matière de protection de l’enfance n’est pas de “faire de son mieux”, mais l’intérêt véritable de l’enfant ».

Dans ses recommandations, l’Ombudsman préconise notamment à la SAE de Toronto qu'elle enjoigne à son personnel et à ses superviseur(e)s de se conformer aux Normes de la protection de l'enfance en Ontario, et qu'elle améliore la formation dans des domaines essentiels – notamment en ce qui concerne les stratégies d’entrevues avec les enfants qui peuvent montrer de la réticence à leur parler. Il recommande également que l'histoire de Brandon serve d'outil de formation « afin de renforcer la nécessité de garder sa prestation de services centrée sur l’intérêt véritable de l’enfant ».

« Le cas de Brandon nous rappelle que les sociétés d’aide à l’enfance doivent rester vigilantes et veiller au respect des exigences réglementaires et des normes prescrites, qui préconisent la cohérence et la rigueur dans la prestation des services et les orientent vers l’intérêt véritable des enfants », écrit l’Ombudsman.

L’Ombudsman est tenu de décrire les constatations de mauvaise administration qui ressortent d’une enquête en utilisant les adjectifs prévus par la Loi sur l’ombudsman. Il a conclu que les services fournis par la SAE et sa réaction aux signalements concernant la protection de l’enfance dans le cas de Brandon étaient « contraires à la loi », « déraisonnables » et « erronés » en vertu de la Loi sur l’ombudsman. Cependant, il a souligné qu’il est « encouragé » par par les plans faits par la SAE pour mettre en œuvre ses recommandations.

« Je salue sa réponse exemplaire, tant sur le fond que sur la forme, » écrit-il. La SAE s’est engagée à informer le Bureau de l’Ombudsman tous les six mois des progrès dans la mise en œuvre des recommandations, et sa réponse initiale aux recommandations est annexée à ce rapport.

 

Source: L'Ombudsman de l'Ontario, Canada

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